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Entrevue avec Jean-François Denis
Entrevue réalisée jeudi le 24 janvier 2008.
- Producteur-diffuseur-présentateur chez empreintes DIGITALes depuis 18 ans. Producteur-diffuseur Réseaux (avec Robert Normandeau et Gilles Gobeil) jusqu’à présent. Comité artistique du Centre de Musique Canadienne (CMC), Fondation SOCAN, Filles Electriques, … & Simon.
- Compositeur pratiquant, pièces sur bande et en direct. Fin des années 80.
- DX-7 de Yamaha, et professeur. Magnétothèque importante 1985–89.
- L’idée de la CEC émerge.
- Le vrai point de convergence et déclencheur était ses études à Concordia en communications (1979–82). Cours de son. Cours d’électroacoustique l’intéresse.
- Pas Art audio. Un travail dirigé mais exploratoire. Pas Hörspeil. Rencontre Kevin Austin.
- Cours ouvert. Découvre création sonore. Tout est possible en électroacoustique. La pièce d’Henri Pousseur « Trois visages de Liège » est déterminante.
- Faire trajet à rebours. Pratique d’aujourd’hui est très différente que celle d’il y a 10, 40 ans, 20 ans.
- Similitudes ? La pratique s’est bien développée, mais en général, l’attitude est la même ou presque : quels sons, quand, pourquoi ? Idée de « fixer les sons ».
- La pensée musicale, la perception n’a pas tant évolué que ça; on ne vit pas la musique de la même façon aujourd’hui.
- Commentaires sur son écoute récente : il ne trouve pas de différences fondamentales. Ces pièces jouent avec mêmes éléments, ç.à.d. le silence et l’agencement de sons qui va créer des évocations sensorielles. On fignole plus; allusion à la diffusion par plusieurs haut-parleurs. Utilisation multiphonique.
- Approche bruitiste. Allusion à « Variations pour un porte et un soupir ». Travail de gestes et de répétitions-variations. Un patrimoine créatif.
- Le contexte social a beaucoup changé. Montréal, par exemple a connu des années pivots : studios institutionnels, McGill, Université de Montréal.
- McGill University dans les années 70, Concordia University et l’Université de Montréal.
- Donc, la création d’une première génération. Ils vont étudier et deviennent (début des années 80), enseignants.
- Marcelle Deschênes,Yves Daoust, Francis Dhomont.
- Ceux-ci rapportent autre couche de connaissance : c’est la création de la deuxième génération : Gilles Gobeil, Mario Rodrigue, Stéphane Roy, Robert Normandeau. Une autre génération se prépare.
- Des cours d’electro à Concordia a été très important. Il est allé à Mills College, puis revient et est professeur à Concordia, où il remplace Kevin Austin.
- Bandes reliés aux concerts organisés par Austin. Les bandes, suite à appel d’offres, arrivaient par la poste… des centaines de bandes. Denis continue à organiser des concerts et réalise le potentiel de ces bandes (1985).
- Filemaker sur le Macintosh. Il entreprend de faire une base de données, un catalogue des œuvres, et inscrit toutes les exécutions publiques CECG/GEC (Concordia Electroacoustic Composers’ Group / Groupe électroacoustique Concordia).
- Il publie un livre « Q-Résonance » avec toutes les données pour montrer ampleur et vivacité de la musique au Canada et aussi de l’extérieur.
- Ce groupe rassemble de l’information, une sorte de bulletin est envoyé à +/- 400 personnes sur les activités Bulletin GEC/CEG Newsletter. L’idée émerge de créer la CEC.
- Lorsque la bande de données est concue en 1986 (environs) c’est la même qui servira de base à celle qui fait l’objet de ce projet.
- Influences américaines ou européennes. Électroacoustique est très large.
- Essentiellement la musique électracoustique américaine n’est pas un genre distinct. Mais l’ajout d’une nouvelle famille d’instruments à l’orchestre.
- Les américains s’y intéressent via le synthétiseur : Moog et Buchla et Serge Tcherepnin. Ilsne remettent pas en question la façon de composer et d’entendre, pas cette vision là. On trouve des pièces pour bande, mais c’est mélodique et harmonique. Distinction entre musique pour bande, musique mixte et musique en direct. Donc pas de remise en question du genre mais plutôt lune extension de l’orchestre.
- En Europe c’est une remise en question de l’art des sons. Allusion à Pierre Schaeffer.
- Nomme musique concrète, écoute réduite, objet sonore. Pierre Schaeffer n’est pas l’inventeur mais le découvreur. « Le Traité des objets musicaux ». (1966).
- Pierre Schaeffer nomme ça musique concrète, puis le terme musique électro-acoustique apparaît.
- Synthétiseur, oscillateur. Fusion des termes et des deux approches. Approche mixte entre sons du quotidien et sons de synthèse.
- Élabore sur le terme électro-acoustique. Terme qui exisait déjà. Et l’aspect paradoxal de la terminologie. Confusion entre instrument et genre musical.
- Englobant ne comprend pas la guitare sèche amplifiée (description physique).
- Denis a enlevé le « - » pour que ça devienne électroacoustique, pas un terme technique, mais un genre musical. Il revient sur les trois grandes familles.
- Pièces sur bande, mixte, live.
- Il parle d’œuvres pour instrument et bande mais qui ne sont pas des œuvres électroacoustiques. Exemple : karaoke et chanson.
- Changement esthétique au cours des années dans les œuvres recueillies à la Magnétothèque de Concordia. Musique américaine et canadienne anglaise étaient plus des musiques électroniques. Ça se ressent dans la Collection. Il parle de certaines distinctions.
- L’idée de la création de la CEC. 2–3 événements importants : en 1983, à l’Université Simon Fraser (Vancouver) le congrès du ICMC, où plusieurs praticiens se rencontrent et discutent de l’électracoustique au Canada; et en 1985, la Music Gallery à Toronto présente un festival de trois jours Wired Society, organisé par Al Mattes et qui veut célébrer la musique électroacoustique.
- Le Bulletin de la CECG/GEC diffuse l’information et fait un appel d’œuvres. Il invite ses étudiants à y aller. 10–12 y vont. Et engagent étudiants à déposer des œuvres.
- Une deuxième génération — Guy Michel, Pierre Olivier, Pascale Trudel — participent à un Forum pour mettre sur papier une association. Rendez-vous est donné deux ans plus tard (Ned Bouhalassa, Roxanne Turcotte sont dans sa classe).
- En 1987, Kevin Austin a organisé le festival « 2001 moins 14 ».
- Entre 1985 et 1987 Austin, Jean-François et quelques autres préparent une chartre. Journée de discussion, plénière sur création de organisme. Deux personnes traduisent : Denis et Claude Schryer.
- Fondation de la CEC avec 101 membres fondateurs.
- Acronyme. CEC. Caractère associatif. Structure : membres élisent la Comité Artistique lors de réunion annuelle.
- Le mandat de la CEC : diffusion de l’information.
- Plaque tournante d’information et de diffusion de l’information.
- La CEC est terriblement égalitaire. Pas de distinction est faite entre anglais et français.
- Aussi désir d’internationalité. Radio… pour diffusion. Faire connaître la vivacité canadienne.
- Dès que la CEC est formé, toute la deuxième génération Robert Normandeau, Paul Dolden, Gilles Gobeil, Mario Rodrigue gagne de plus en plus de prix. À Bourges, par exemple. Beaucoup plus qu’avant, grâce à la démocratisation de l’info. D’autres concours, à Boston, à Prague…
- Sont les compositeurs québecois plus bons ? Non. Mais ils sont au courant, donc postulent.
- Nous sommes pré-internet. Internet existe mais avant sa popularisation. Les infos sont transmises via le papier et la poste. La CEC fait ce travail de traduire les textes et de les poster dans le monde occidental. Ça répond à un besoin et stimule un ensemble de personnes qui font de l’électroacoustique, quelle que soit la manière.
- Outils similaires et un intérêt commun pour la chose.
- C’est pour ça que le travail de la CEC dans partage de l’info, deux façons de faire entendre la musique : radio et concert. La radio rejoint beaucoup plus de monde que le concert.
- Radio-Canada, CBC, les radios communautaires et radios collégiales.
- La CEC a fait un répertoire des noms d’émissions et réalisateurs. Supports de diffusion : cassettes, vinyls et bandes 1/4 de pouce. Donc cher à l’envoi. Liste des concerts, organisateurs de festivals.
- Formellement non. La CEC a bénéficié d’un accueil gratuit dans le local de Kevin Austin. Mais pas de lien spécifique avec les universités. Mais un lien par rebonds via professeurs-étudiants.
- Le Bulletin CECG/GEC Bulletin, puis Contact! — au besoin plusieurs fois par année.
- Flash! Micro-nouvelles.
- Ensuite, grâce à l’Internet et au courriel, eContact! et eFlash!.
- Sa présidence; la structure. Premier président élu de la CEC jusqu’en 1989.
- Les premières années sont dans la continuité du travail de Kevin Austin et du CECG/GEC.
- Il participe à la production de Journées Électroacoustiques, de rencontres.
- À la fin des années 80 on voit la popularisation du disque compact, développement de la technologie.
- La première chose que ça a changé : l’accès à l’information.
- La CEC a été très importante. C’est la seule association de compositeurs vraiment bilingue. Une association qui s’occupe d’une frange de la pratique musicale dont on s’occupait moins.
- Stimuli pour plusieurs, canadiens ou non. Donne l’exemple d’un compositeur espagnol.
- Par sa générosité dans le partage de l’info, la CEC a changé la manière de faire de l’électracoustique et d’écouter.
- Nous sommes en 1985. L’Art radio existe et est nommé. L’Écologie sonore arrivera plus tard. Claude Schryer. Pas d’élimination stylistique. Ouvert et très très large dès le début.
- Allusion au travail sonore de Glenn Gould. Pas de clivage au début. C’est arrivé plus tard lorsque des sous-groupes ont été créés.
- Revient à l’Écologie Sonore. Le WFAE (World Forum for Acoustic Ecology). Allusion à Hildegard Westerkamp. Mais les deux sont membres de la CEC. (Schryer et Westerkamp).
- Le poids vient du nombre dans une sphère donnée, mais il n’y a pas de coupure comme tel.
- Non pas encore mais « démocratisation de l’information », oui.
- Avec en parallèle démocratisation des moyens de communication et développement technologique.
- La CEC ne produit pas de concert, [coordonne] des événements (où il y avait des concerts) mais ne produit pas de concerts. C’est un nouvel organisme créé pour répondre à de nouveaux besoins. Un nouveau service.
- La Magnétothèque de Concordia poursuit. Appel d’offres, appel d’œuvres. La Magnétothèque continue à accumuler des œuvres. Appel d’œuvres, appel d’offre.
- Un choix artistique est fait pour les concerts; mais sinon pas de discrimination.
- Dans le mandat de la CEC on spécifie que la CEC « …doit porter une attention particulière à la pratique/représentation des femmes en électroacoustique ».
- Lorsqu’il est actif, la CEC n’a pas de position éditoriale. Mais est une courroie de transmission seulement. Que les compositeurs décident ce qu’ils sont. La CEC demeure un véhicule d’échange d’information.
- En 1985–89, Denis est un peu partout.
- Austin-Denis sont les mêmes personnes — un pont humain — mais il y a une grande distinction à faire entre les activités de l’un et de l’autre. Chacun bénéficie de l’autre.
- Donc la Collection de Concordia existait avant bien sûr.
- Q/Résonnance, préparé par JF Denis comme un livre, est posté partout. Il décrit comment s’est faite l’accumulation des œuvres : recevoir les bandes et les garder, parce que trop grands frais de postes pour les retourner.
- Complémentarité CEC et la Collection Concordia.
- Congrès à Banff, Toronto, Montréal.
- Communication et association se distinguent.
- Il quitte Concordia comme professeur en juin 1989. Il quitte la présidence de la CEC en novembre 1989.
- En 1990 le CEC change. D’autres personnes. Et la distinction avec Concordia s’amplifie.
- Puis perte de financement complet vers 1995.
- Période difficile. Kevin Austin et Concordia réabritent la CEC, encore maintenant.
- Mais il n’y avait pas de structure d’accueil. Les bandes 1/4 de pouces ne sont pas écoutables sur système maison. Mais une entente d’emprunt avec certaines radios qui pouvaient diffuser les bandes éxistait.
- Le présent projet de numérisation des archives permettra une mise à la disposition des œuvres de la Collection. Masse de musique extraordinaire.
- En 1989 lorsqu’il termine son enseignement, le besoin de « faire plus » apparaît, dans contexte associatif, très important pour lui. Mais ce modèle est lourd et pas le meilleur pour prendre des décisions rapides.
- Ça devient nécessaire de créer une maison de disque, de rendre disponibles ces œuvres.
- Il fait un sondage en 1988–89, prend le pouls auprès des compositeurs et fait le tour de toutes les étiquettes de musique indépendante pour voir si elles sont intéressées par ce répertoire. Non. Elles ne sont pas prêtes à accueillir ces œuvres.
- Denis forme une équipe avec Claude Schryer et fondent empreintes DIGITALes en 1989. Les lecteurs CDs sont moins de $200. Tout début du disque compact.
- Ces œuvres-là, (recueillies entre 1985 et 1989) celles ont été ramassées pendant son passage à la CEC et sont ciblées et reliées à ses activités subséquentes. Concert pour écouteurs, walkman existe.
- Concert de musique multiphonique. Quadraphonique (ou tétraphonique). Robin Minard présente « Qu’il m’en souvienne », Francis Dhomont aussi.
- Ces œuvres apparaissent dans la Collection.
- Une certaine générosité, un certain degré « d’audacité ». Et de la patience. Se donner un temps d’écoute, une prédisposition et donner une chance au coureur. Des critères et de normes en rapport avec musique symphonique. S’asseoir, dans un environnement propice et appuyer sur « Play ».
- La musique électroacoustique est étonnante parce qu’il peut se passer à peu près n’importe quoi. On sera surpris. Les choses seront étonnantes, d’autres moins satisfaisantes. Ça prend du temps et une « volonté de vouloir ».
- Les bandes existent. Des gens pourront écouter et indiquer des perspectives. Oui, il existe des notes de programme, mais ça prend quelqu’un d’autre pour mettre ça en perspective.
- Oui c’est un devoir de mémoire mais surtout rendre les œuvres disponibles. Différent comme démarche que les Archives Nationales. Ça répond à un appel d’œuvres.
- Fait allusion à Bourges (France) et à son immense répertoire d’œuvres. Insiste sur l’accessibilité aux œuvres du projet Concordia.
- Bonne question. On vit tous dans les medias, et le miracle internet. Et c’est un leurre.
- Fait allusion à un site mp3.com qui n’existe plus, où les gens pouvaient déposer des œuvres en qualifiant eux-mêmes leurs œuvres.
- L’œuvre était donc là, attribuée à un certain genre. Ça devenait juste un gros disque dur, avec un paquet de pièces, mal cataloguées. L’internet offrait ce genre de leurre, où on ne pouvait pas trouver vraiment ce qu’on cherchait, si on cherche quelque chose d’un peu plus spécialisé.
- Le « clic» ne suffit pas. Il est nécessaire d’attirer les gens, de contextualiser les œuvres, d’associer les œuvres. Le travail éditorial sera toujours nécessaire.
- Même question lui est posée face à empreintes DIGITALes et de l’éventualité de la disparition des maisons de disques. Les gens semblent s’inquiéter. Pour lui les maisons de disques ne disparaîtront pas. Mais deviendront peut-être des « maisons d’albums musicaux ».
- Car on aura toujours besoin d’un filtre humain pour guider l’internaute. Pour arriver à faire confiance au label. Donc c’est la décision (ou recommandation) éditoriale qui donne cette crédibilité.
- Ramasser les œuvres dans des collections. On aura toujours besoin de collections.
- Allusion aux débuts d’empreintes DIGITALes.
- Prend le modèle de ECM. Avec signature forte, par les partis pris d’enregistrements et choix esthétiques.
- Nécessaire de pouvoir proposer des pistes d’écoute, des propositions de découvertes. Internet vient faciliter une partie du travail mais une partie seulement; ça prend autre chose pour « faire sens ». Il y aura toujours un besoin de collection.
Interruption de composition ?
- Jean-François Denis a plusieurs flammes d’allumée. Une c’est le compositeur de son, l’autre c’est le producteur, celui qui veut concrétiser les choses les idées, faire. Et l’autre, le troisième, c’est le communicateur : faire que les gens se parlent, se connaissent, se rencontrent. Les trois flammes sont plus ou moins allumées au cours des années.
- Il a arrêté la composition essentiellement à cause d’un manque de temps, autour des années 1993–95. La maison de disques prenant beaucoup de place. Il trouvait de plus en plus difficile de passer de l’abstraction à l’esprit cartésien nécessaire au producteur et a métamorphosé la flamme musicale dans la production et la communication.
- Quand il va dans un festival, espace concentré de musiques, ça le fouette et lui redonne le goût de participer à cette mouvance-là. Mais le quotidien le ramène rapidement à son travail. Il est maintenant dans le processus de « faire de la place ».
- Retour au répertoire des archives. Ses œuvres dans la collection ? Fait allusion à certaines œuvres en situation de concert live dans la collection, comme « Métamorphose trois », œuvre en direct.
- Une façon de noter les œuvres à l’époque. Fait allusion à la SOCAN. Échange sur l’accessibilité.
- Ses dernières œuvres sont pour chorégraphe ou situation hybride. Chorégraphie et temps imposé. Libère de la responsabilité de la gestion du temps pour se consacrer au matériau et au développement, donc à composer.
- Autres œuvres, comme« Trajectoires », où Sergio Barosso lui demande une œuvre. « Trajectoires parallèles » est la suite. Quelques brèves informations techniques.
- Quelques pièces mixtes dont une avec Yves Charuest et une autre avec contrebasse.
- Un travail instrumental avec un approche de travail mixte.
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