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Éditorial

Une idée inspirée du festival Sines & Squares 2014 de Manchester, organisé par notre rédacteur invité Richard Scott, est à l’origine du choix des thèmes abordés dans ce numéro, notamment la résurgence spectaculaire de l’intérêt pour la synthèse modulaire, son rôle dans la performance en direct, la composition pour support fixe, la conception sonore, le « patching » et la méthodologie.

Le festival Sines & Squares a réuni des compositeurs, interprètes, fabricants, musicologues et adeptes de l’approche DIY pour un week-end de concerts, séances interactives, installations, classes de maître, démonstrations et ateliers. Une quarantaine d’interprètes, compositeurs, chercheurs, concepteurs et fabricants ont eu la chance de présenter leurs idées et travaux. L’objectif du festival était de contribuer à approfondir et enrichir la culture associée aux technologies musicales analogiques et modulaires. Nous espérions créer une communauté d’échange où se tisseraient des liens entre universitaire et non-universitaire, électronique et électroacoustique, analogique et numérique, technique et esthétique, concepteurs et utilisateurs, compositeurs et musicologues, pratiques artistiques antérieures et actuelles.

Plusieurs des articles de ce numéro sont directement dérivés des communications et performances présentées lors du festival, d’autres s’en inspirent et en développent les thèmes. Nous n’avons pas la prétention de proposer un portrait complet de l’état actuel de la technologie ou des milieux qui ont contribué à sa création et son développement, mais nous espérons traiter certains sujets un peu plus en profondeur que ne le permettent habituellement les médias sociaux. Ces contributions se présentent sous différentes formes : certains textes adoptent un point de vue plus académique, technique ou philosophique, d’autres expriment davantage un point de vue artistique personnel. Les articles sont regroupés en quatre sections. On ne manquera pas de constater le chevauchement et l’interaction entre ces catégories, mais nous avons cru bon de les grouper ainsi pour les besoins de cette présentation.

  1. Rudiments — articles traitant des fondements théoriques, techniques et pédagogiques de la synthèse analogique.
  2. Invention — discussions de conceptions, idées et outils particuliers.
  3. Concepts — contributions philosophiques, esthétiques et théoriques qui explorent et développent certaines notions de base.
  4. Trajectoires — comptes-rendus de recherches et projets qui illustrent différentes façons dont les synthétiseurs analogiques et modulaires stimulent la pratique créatrice individuelle et la recherche artistique.

Rudiments

« Generalized Introduction to Modular Analogue Synthesis Concepts » de Kevin Austin offre un point de départ pour ainsi dire naturel pour cette section et le numéro dans son ensemble. Austin y présente les rudiments et concepts fondamentaux de la synthèse analogique conventionnelle, en plus d’y aller de suggestions concernant la notation et l’analyse de « patch ». Étonnamment, ce type de contenu semble souvent faire défaut dans les ressources et les discussions en ligne. Philippe-Aubert Gauthier et Stéphane Claude abordent également ce type de contenu de base, sous l’angle de leur transmission en contexte d’atelier à des étudiants de synthèse modulaire. Les auteurs présentent un modèle intéressant de pédagogie modulaire dans « Considerations on a Workshop on Modular Synthesis for Audio Arts ». Leur approche se concentre sur la transmission de principes de base tout en tenant compte du fait que différents utilisateurs souhaiteront construire différents systèmes destinés à différentes fonctions musicales avec lesquels ils voudront interagir de différentes manières. L’apprentissage pratique collectif est ici au centre de leurs préoccupations. La pratique musicale collective semble émerger spontanément des activités en atelier, ce qui peut certainement être considéré comme un indicateur important du succès de l’atelier et la consécration de l’approche créatrice du sujet par ces auteurs.

Enfin, cette partie traitant des rudiments et éléments essentiels se termine avec « The Serge VCS: How it works » de Tim Stinchcombe, où l’auteur offre une analyse technique du très important générateur multifonction de Serge Tcherepnin, au cœur de nombreux modules, non seulement les appareils Serge d’époque, mais également plusieurs systèmes plus récents. Les circuits de Tcherepnin combinent plusieurs des principales caractéristiques des synthétiseurs contrôlés en tension : génération de voltage et de signal audio, traitement de voltage et de signal audio, diverses fonctions logiques. Dans sa discussion des fonctions modulaires de base, plus loin dans ce numéro, Navs soulignera l’importance de ce circuit sur le plan de la pratique.

Invention

Pour cette section, nous sommes heureux de présenter des articles originaux de deux des concepteurs et fabricants de synthétiseurs actuels les plus créatifs. Rob Hordijk est le créateur et fabricant de circuits chaotiques très recherchés tels que le Blippoo Box, le Benjolin et le Rungler, ainsi que son propre système modulaire d’une très grande originalité. Dans « Designing Instruments for Electronic Music », il nous parle brièvement et avec clarté de son approche personnelle en matière de méthode et de conception d’instruments destinés à la musique électronique. L’auteur y déploie un argument pratique et direct rafraichissant sur un sujet trop souvent en proie au mythe et au malentendu. À l’instar de Don Buchla, Hordijk conçoit le synthétiseur d’abord et avant tout comme un instrument de musique constitué essentiellement d’un ordinateur analogique dont la finalité est d’exprimer diverses fonctions algorithmiques. Par la même occasion, il remet en question les croyances répandues au sujet des mystères impénétrables du son analogique et de la supériorité technique du numérique. Dans le processus de conception qu’il décrit, analogique et numérique sont tout simplement deux outils différents dont le choix est le résultat de décisions rationnelles sur la pertinence et l’efficacité de la méthode pour chaque cas particulier. Si bien des musiciens apprécient et vantent les insuffisances des conceptions analogiques des instruments « vintage » — distorsion, bruit, non-linéarité — au point parfois de louanger les caractéristiques de certains composants — vactorals, amplificateurs opérationnels, lampes, transformateurs et germanium —, ce type de nostalgie ne trouve aucun écho dans l’approche de Hordijk en matière de conception ni dans ses propres choix de composants et de circuits analogiques. Pour chaque tâche précise, le choix entre numérique et analogique est une question d’allocation des ressources appropriées plutôt qu’une adhésion idéologique. Hordijk met en quelque sorte fin au débat analogique/numérique : ce sont des choix en fonction de considérations relatives à la conception, et non des appartenances religieuses.

À bien des égards, on pourrait croire que personne ne peut être plus loin de Rob Hordijk, dans l’univers du synthétiseur, que le créateur de l’« Oval Synthesizer », Peter Blasser de Ciat-Lonbarde. Ce dernier s’intéresse au plus haut point à la conception d’instrument comme œuvre d’art expressive et la construction d’instrument comme forme d’artisanat. En plus des instruments qu’il a conçus et construits, il continue de créer toute une nomenclature poétique entourant ces instruments. Là où le langage et les instruments de Hordijk semblent neutres et scientifiques (du moins en apparence), les instruments de Blasser et les idées qui s’y rapportent sont clairement faits à la main et fantaisistes, faits en grande partie en bois, et d’une facture visuelle qui les fait ressembler davantage à des bricolages DIY ou des formes d’art populaire qu’à des produits issus de procédés scientifiques ou industriels. Mais les deux ont beaucoup en commun. Si l’approche de Blasser semble incompatible avec les approches plus orthodoxes de certains des auteurs présentés ici, il est possible de trouver des manières de penser plus apparentées, pour peu que l’on creuse un peu. L’utilisation et l’organisation de fonctions génératives pour plusieurs des instruments de Blasser s’avèrent fort compatibles non seulement avec la façon de penser de Hordijk, mais aussi avec les approches présentées ici dans les articles de Spicer, Gaston, Dalgleish et Parmar. Blasser se préoccupe également beaucoup de l’interface. Lorsque nous examinons ses créations inhabituelles, nous devons comprendre non seulement les fonctions des circuits, mais aussi comment l’interaction entre les circuits s’exprime comme instrument, et les rapports entre ces fonctions et l’interface; ce qui est ramené à la surface et rendu jouable.

Concepts

Cette section s’ouvre sur une contribution de Navs en lien direct avec l’analyse que fait Stinchcombe du module VCS de Serge, en montrant comment ces différentes fonctions techniques se traduisent en fonctions musicales utiles. Navs insiste sur l’importance, pour les utilisateurs de synthétiseurs modulaires, de comprendre comment ces fonctions individuelles sont dérivées. Son approche, que l’on pourrait résumer sous la forme de la devise « Artisan, connais tes outils », remet en question les croyances répandues au sujet du module-comme-plug-in ou module-comme-instrument. Il rejette la notion de « module » comme unité de base permettant de comprendre un synthétiseur et conçoit plutôt les modules comme des collections de fonctions de bas niveau. Dans « Appeal for a greater understanding of rudimentary modular functions », Navs souligne une différence importante entre les approches fonctionnelles plus réductives, correspondant à la programmation de bas niveau, et des principes fonctionnels de haut niveau plus directifs. Ceci témoigne peut-être de la situation actuelle en matière de conception modulaire, alors que des modules à menus de plus en plus complexes, dont l’accès aux fonctions individuelles est souvent restreint, font leur apparition sur le marché.

« Synths and Social Capital » de Andrew Duff aborde une dimension plus sociale et psychologique et nous rappelle que les différents niveaux de connaissance technique et de pratique qui caractérisent la « communauté » des utilisateurs de synthétiseurs modulaires sont tributaires de cette communauté. La connaissance est un phénomène social et le savoir collectif qu’une communauté incarne et perpétue est le produit de chevauchements entre différents milieux informels, réseaux, groupes de discussion, forums et médias sociaux. Ces communautés ont leur propre identité, leurs motivations et leurs moyens d’échange. Chacun des auteurs ayant contribué à ce numéro a des liens avec ces réseaux qui se recoupent, et le numéro lui-même est en partie un commentaire sur ces réseaux.

Ryan Gaston commence par retracer l’échec historique du synthétiseur modulaire comme instrument d’ensemble et destiné à l’interprétation au sens traditionnel du terme pour ensuite proposer sa conception du synthétiseur modulaire comme nouvelle sorte d’« instrument à timbre ». Dans « Plays Well with Others: Regarding modular synthesizer in collaborative performance practice », il contextualise son rôle unique et son potentiel dans l’histoire des instruments électroniques et de la composition électroacoustique. Il livre ici un plaidoyer en faveur du synthétiseur modulaire contemporain comme instrument de performance qui peut trouver sa place dans une foule de contextes, un point de vue plutôt difficile à défendre il y a encore quelques années à peine.

Michael Spicer présente pour sa part une approche de la synthèse modulaire basée sur les notions d’agent et de fonction dans « An Agent Approach to Working with Modular Synths ». Dans un système modulaire, des « fonctions-agents » pourraient par exemple offrir un modèle abstrait d’entrées, de sorties et d’effecteurs servant à décrire, visualiser et comprendre l’interaction de forces actives dans le programme (générative, aléatoire, cyclique, déterministe), en particulier pour les systèmes dont la complexité les rend pratiquement incompréhensibles à l’aide de représentations conventionnelles telles que les modèles de fluence de signal. Cette idée remet peut-être en question la notion de contrôle instrumental : nous gérons des programmes (« patches »), nous les supervisons, nous les imaginons; peut-être pourrions-nous utiliser d’autres métaphores plus appropriées que celle de « contrôle ».

Mat Dalgleish s’intéresse également à la question du contrôle dans « The Modular Synthesizer Divided: The keyboard and its discontents », où il aborde la délicate question de l’interface en expliquant les différences dans le développement des systèmes modulaires Buchla et Moog au cours des années 1960–1970, pour ensuite passer aux formes plus récentes de domination du portable et des technologies dites « NIME » (New Instruments for Musical Expression), et poursuivre avec l’intérêt renouvelé pour ces questions par l’Eurorack. On peut se demander si la question de l’utilisation du corps pour le contrôle de ces instruments n’est pas négligée depuis trop longtemps par les concepteurs et les fabricants.

Pour clore cette section, le batteur et multi-instrumentiste acoustique David Ross nous entraîne sur une piste différente avec « Time Modulation: Rhythm, relativity and voltage control », où il expose un point de vue personnel sur la modulation du temps dans les systèmes contrôlés en tension. Ayant passé la majeure partie de sa vie musicale à travailler avec tout sauf l’électronique, Ross est un converti un peu surprenant, mais il s’est plongé profondément dans la synthèse analogique depuis quelques années. Son texte vante la musicalité organique et la malléabilité du contrôle de tension qu’il oppose au manque de flexibilité des contrôles temporels quantifiés des outils numériques.

Trajectoires

Cette dernière section comprend une série de comptes-rendus de pratiques artistiques, projets de composition, recherche et performance, et de réflexions d’artistes. Le terme « trajectoire » suggère les notions d’énergie et de direction, mais aussi d’inachèvement et de multiplicité. Les artistes n’étant pas faits pour s’entendre entre eux, il m’apparaît vain de procéder à des formes de généralisation ou de chercher des thèmes communs ou des points de convergence entre les utilisateurs de synthétiseurs modulaires. Ces différents comptes-rendus témoignent donc de l’importance et de l’influence des outils modulaires dans le processus de création de chaque auteur.

Joseph Hyde illustre cette individualité en décrivant son propre développement artistique et son intérêt actuel pour le synthétiseur modulaire comme outil sonore. L’« ensemble » hybride que Hyde décrit dans « It’s Not an Instrument, It’s an Ensemble: A Parallel approach to modular synthesizer design » a beaucoup de sens, bien qu’il soit loin d’être un système analogique modulaire complètement flexible par rapport à ses propres objectifs artistiques, lesquels nécessitent la répétabilité et un niveau de contrôle très élevé. Le type d’approche hybride qu’il préconise, à la fois conforme aux attentes et hors des sentiers battus, et sa conception d’un « ensemble » adhèrent à l’idée d’une interface analogique sans rejeter les méthodes de composition et de contrôle propres à l’informatique. Ce type d’approche est devenu plus facile à mettre en œuvre de nos jours, d’un point de vue technique; nul doute que bien d’autres compositeurs s’y intéresseront dans le futur.

Dans FRAMEWORK, qu’il présente dans un article intitulé « Interpretation of Graphic Scores Using a Small Modular System », Mads Emil Nielsen explore différentes approches de la composition et de l’interprétation de partitions graphiques à l’aide d’un petit système modulaire comprenant des synthétiseurs analogiques modulaires et d’autres instruments. Les partitions témoignent elles-mêmes d’une sorte d’influence analogique et Nielsen observe une forme de correspondance visuelle, morphologique et procédurale entre l’acte de dessiner et ceux d’enregistrer et d’arranger ses compositions à l’aide du synthétiseur modulaire.

« An Artist’s Approach to the Modular Synthesizer in Experimental Electronic Music Composition and Performance » de Chelsea Bruno dresse un portrait de son parcours musical à partir de son travail avec un système logiciel, puis avec la synthèse analogique et finalement avec le système modulaire Eurorack qu’elle utilise actuellement. Elle aborde différentes questions relatives à la performance avec synthétiseur modulaire, notamment sa propre façon de travailler et d’enregistrer, le caractère extramondain de l’instrument et un phénomène que reconnaîtront bien des utilisateurs de technologie modulaire, « le sentiment que la machine a une vie qui lui est propre ». Elle décrit son rapport avec l’instrument et documente ses réflexions et ses expériences d’écriture pour son système hybride combinant un système Eurorack et un ordinateur portable équipé du programme Live d’Ableton.

Les procédures biologiques, psychologiques et électriques employées dans son travail de composition, plus particulièrement la créativité exprimée sous forme d’activité électrique dans le cortex (« ondes cérébrales ») ainsi que la possibilité de les transposer en signaux électriques contrôlant un système modulaire analogique, sont au cœur des travaux actuels de Dave O Mahony. Dans « Real-time Manipulation of Synthesis Parameters Using a Brainwave Interface and a Eurorack Modular Synthesizer », il décrit les technologies employées pour ce projet de recherche et commente les résultats préliminaires de ses expériences.

Nous sommes particulièrement heureux de balayer les préjugés et d’inclure dans ce numéro deux articles adoptant une approche résolument numérique (ou virtuellement analogique) de la synthèse modulaire, à l’aide de deux des systèmes modulaires numériques les plus répandus, le programme Reaktor de Native Instruments et le Nord Modular de Clavia, deux outils qui ont aidé de nombreux utilisateurs et concepteurs de synthèse modulaire analogique actuels à apprendre leur métier. Dans « Creating an Autopoietic Improvisation Environment Using Modular Synthesis », Robin Parmar partage sa réflexion à l’origine du développement d’un environnement logiciel sans entrée (« No Input ») à boucle récursive avec Reaktor, et il discute des dimensions conceptuelles et pratiques de son projet. Sebastian Berweck s’intéresse aux défis et considérations pratiques associés à la reprise d’anciennes partitions de musique électronique en vue de leur réalisation actuelle et de leur performance. Dans « Reviving Parmegiani’s “Stries” (1980): Translation of Historic Analogue Works Into the Digital Domain », Berweck relate comment il a découvert que le Nord Modular G2 n’était pas seulement un outil très efficace pour le travail de recréation des partitions et des performances avec les anciens outils analogiques, mais qu’il était également, dans certains cas, plus approprié que les instruments pour lesquels ces partitions ont été écrites à l’origine.

L’avant-dernier article, « Exploring Real, Virtual and Augmented Worlds Through “Putney”, an Extended Reality » de Ricardo Climent, Mark Pilkington et Alena Mesárošová, s’intéresse à la composition comme recherche. Le projet Putney que les auteurs présentent ici retrace le parcours d’une réflexion musicale et technologique complexe, qui emploie la synthèse analogique et la « pensée modulaire » comme tremplin pour le développement d’idées de composition et de performance intermodale. Malgré sa dimension futuriste, il est intéressant de constater que cet article est le seul du recueil à avouer une certaine forme de nostalgie, un attachement pour le son analogique et l’image d’une « culture rétrograde » comme points de départ. Ceci peut paraître contradictoire par rapport à l’approche anti-nostalgique et utilitariste qui semble rallier plusieurs des auteurs ayant participé à ce numéro. En dépit de son futurisme, Putney propose une forme de romantisme positif à l’égard non seulement des synthétiseurs EMS, mais aussi de leurs composants « vintage » et même de leur localisation historique, comme en témoigne le pèlerinage personnel de Climent à l’endroit où se trouvait le studio EMS original de Peter Zinovieff à Londres. Analogique et modularité sont pris ici davantage comme concepts et métaphores que comme technologie. Le « son analogique » est évoqué, mais presque volontairement mécompris et recontextualisé, une forme de « mécompréhension » qui débouche, comme il arrive souvent en art, sur de nouvelles pistes et de nouvelles formes.

Le dernier article du numéro, « On Misunderstanding Modular Synthesizers » du rédacteur invité Richard Scott, se penche sur certains malentendus répandus sur le sujet et regroupe certains des thèmes qui émergent des articles précédents pour offrir un portrait critique de quelques questions d’actualité — la résurgence, l’obsolescence, l’interface, le caractère d’objet et le futurisme — et poser la question suivante : le modulaire devient-il de moins en moins modulaire?

Si l’on doit retenir un message essentiel de ces 19 articles fort différents, ce doit être qu’il n’existe pas de façon unique de penser et utiliser la technologie. L’influence renouvelée des technologies et pratiques modulaires et analogiques est une invention à plusieurs têtes par laquelle s’expriment non pas une, mais de nombreuses formes de fascination et d’exploration. Si la majorité des articles semblent dépourvus de nostalgie pour un « âge d’or » analogique, c’est peut-être parce que le potentiel musical de la technologie, dans ses incarnations antérieures, n’a pas été pleinement réalisé ou exploré; nous assisterions donc, au moment d’écrire ces lignes, non pas à une forme de retour en arrière, mais un processus renouvelé de découverte et d’invention. Cela dit, malgré l’abondance de nouveaux modules et designs sur le marché, y compris de nombreux modules numériques, des échantillonneurs et des modules à menus, une analyse sommaire des fonctions modulaires de base nous permet de constater que la technologie a peu changé depuis les années 1970. Mais les pratiques technologiques ont changé; elles sont en train de changer au moment où l’on parle et elles continueront à l’avenir. Si l’on doit parler d’âge d’or des synthétiseurs modulaires et des connaissances au sujet de leur emploi et leur potentiel, cet âge d’or est bien ici et maintenant, et non un moment mythique des années 1960 ou 1970.

Richard Scott
Manchester, 25 février 2016

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