eC!

Social top

English

[Talk]

6 Questions au compositeur et vidéaste Pierre Paré-Blais

Pierre Paré-Blais (Montréal, 1984) est metteur en scène avec une formation complémentaire en composition électroacoustique, en cinéma et en vidéomusique. Il commence son parcours en théâtre, se rend à Bali pour étudier la danse et la musique Balinaise, et mène des études en littérature comparée et études anglaises. Finalement, curieux des nouvelles technologies, il aboutit en composition électroacoustique à l’université de Montréal, où il se spécialise en vidéomusique sous la tutelle de Jean Piché, pionnier du genre. Depuis quelques années, en plus de ses vidéomusiques formels, Pierre réalise aussi la conception d’environnements multimédias pour la scène, notamment pour la compagnie de cirque Throw2Catch et l’ensemble de Gamelan Giri Kedaton, avec qui il collabore également comme musicien et danseur occasionnel. Dernièrement, ses explorations vidéomusiques se concentre sur les possibilités qu’apporte la pellicule film (16 mm et 35 mm), lorsque jumelée à l’approche technologique propre au langage de la vidéomusique.
http://www.pierrepblais.com

[1] Veuillez décrire brièvement votre formation et votre cheminement, formel et informel, en musique / art sonore.

J’ai un parcours en musique plutôt particulier, je crois. Bien sûr je joue de la musique depuis un jeune âge; comme bien des enfants j’ai commencé le piano très jeune. J’ai eu la chance de faire mon primaire à l’école FACE (Fine Arts Core Education), où j’ai appris a lire et écrire la musique très jeune en même temps que j’apprenais à lire et écrire le français et l’anglais… Mais c’est beaucoup plus tard et un peu sur un coup de tête que j’ai choisi de me lancer en art sonore et électroacoustique! En 2007, j’étais en train de faire la mise en scène d’un spectacle à tournure hautement technologique, dans lequel nous utilisions beaucoup de musique électroacoustique « old school » comme j’aime dire (du Parmegiani, Henri, et Cie). L’un de mes collaborateurs sur ce projet, Éric Andrade, étudiait alors la vidéomusique à la faculté de musique de l’Université de Montréal avec Jean Piché, et j’étais intrigué, je me suis dit, peut-être y a-t-il quelque chose à apprendre pour moi là-bas. Sans même finir mon bac en littérature, j’ai choisi de faire un transfert en composition de musique électroacoustique, trois ans plus tard j’avais mon bac, une panoplie de nouvelles cordes à mon arc, et aucun regret!

[2] Pouvez-vous décrire vos activités actuelles en musique/art sonore, qu'elles soient privées, destinées à votre milieu, ou publiques? Veuillez indiquer le statut que vous accordez à ces activités : « professionnelle », « artistique » ou autre type d’activités.

Mon activité artistique a toujours été multiple… je dirais que suis surtout actif dans le monde de la scène et du cinéma de nos jours, plus que celui de la « musique formelle ». En raison d’un bagage important en théâtre, mes activités électro / multimédia se sont vite transformées en conception multimédia pour la scène (i.e. mapping complexe, environnement interactif), notamment dans le monde du cirque, où je collabore étroitement avec diverses compagnies montréalaises comme Throw2Catch. Comme ma formation en vidéomusique m’a doté d’un fort bagage en son et en vidéo, il y a aussi un volet important de mes activités professionnelles qui se déroule dans l’univers du cinéma — je travaille comme preneur de son, mixeur et artiste de sound design, mais aussi comme directeur photo, caméraman, étalonneur, et même occasionnellement artiste VFX.

Pierre Paré-Blais
Pierre Paré-Blais, en tournage dans le Vieux-Montréal comme 1er assistant caméra. [Click image to enlarge]

[3] Veuillez décrire brièvement votre emploi des technologies dans vos activités créatrices. Vous pouvez inclure une courte description de l’équipement et des logiciels ou services que vous utilisez (nombre d’ordinateurs, téléphones, numériseurs, Facebook, Skype, etc.). Veuillez également comparer votre utilisation des technologies mobiles avec votre utilisation antérieure (il y a quelques années) de ces technologies.

Bon, disons que du côté logiciel, il y a les « standards », dont Pro Tools, Avid Media Composer, After Effect, Max/MSP Jitter. Quelques logiciels spécialisés comme VPT (video projection tools) pour le mapping. Je suis aussi très Mac en général : Mac Pro, MacBook Pro, iPhone, etc. Je travaille dans mon propre studio qui a la particularité d’être à la fois une salle de montage vidéo et un studio de mixage sonore, avec une petite chambre noire à l’arrière. Il y a les caméras également; je suis très Canon et Blackmagic de ce côté, sans oubliée ma Bolex H16. Côté mobile, il y a quelques années je vous aurais probablement dit quelques chose comme : « bah… toys for grown ups! », mais aujourd’hui, je serais peut-être un peu naïf de dire la même chose. En fait, je regrette même un peu de ne pas m’être penché sur l’offre de ces outils plus tôt. Par exemple, je commence à peine à découvrir les possibilités qu’offre le protocole OSC lorsque jumelé aux technologies mobiles, et je ne saurais me passer de mon iPhone, autant pour le travail que le plaisir!

[4] Comment voyez-vous l’apport de ces technologies dans les champs d’activités créatrices où vous les employez? Vous pouvez aussi donner vos commentaires au sujet des technologies que vous n’utilisez pas (et en donner les raisons). Les médias sociaux contribuent-ils à ces activités ou, au contraire, ont-ils un effet négatif?

Ah, quelle belle question… Pour moi, la technologie est un outil comme toute autre forme d’outil. Naturellement, c’est l’outil avec lequel j’ai commencé (je n’ai jamais connu la bande magnétique comme support de travail, ou même l’époque pré ordinateur portable en musique électroacoustique), et c’est l’outil qui risque de me suivre toute ma vie. Mais l’artiste selon moi se doit de voir tout l’éventail de ce qui s’offre à lui, sans discrimination, pour faire grandir sa pratique sans limite. Personnellement, j’aime autant travailler avec ma Bolex 16 mm ou une Arriflex 35 mm que ma Canon 5D MkII ou ma BlackMagic Cinema Cam, et ce sans aucun sentiment de nostalgie. Ce sont des outils puissants, qui le deviennent encore plus lorsque combinés. Un outil analogique n’oblige pas nécessairement un travaille analogique selon moi, et un outil digital n’exige pas nécessairement un workflow complètement digital!

[5] Facebook, MySpace, YouTube, Skype, Twitter, les blogues… sont les références des étudiants que je rencontre chaque année. Y a-t-il des moyens pour les générations précédentes d’utiliser ces technologies de manière à communiquer nos valeurs à ceux qui sont nés après 1988?

Je ne sais pas trop comment répondre à cette question. Je suis né en 1984, je fais parti de cette génération de la fin des années 70 et début 80 qui a grandi en même temps et à bien des égards au même rythme que ces technologies que nous prenons aujourd’hui pour acquis… j’ai été parmi ces premier utilisateurs de Facebook, mon compte Vimeo remonte au début de ce site extraordinaire pour les artistes vidéo. Il y a peut-être juste Twitter qui me semble encore étranger… c’est intéressant, je ne sais pas pourquoi, mais cela ne ma jamais attiré, et c’est une tendance que je remarque beaucoup dans ma génération, aujourd’hui je suis sur Twitter par « obligation professionnel », mais je ne m’en sert presque jamais, et je continue de trouvé le concept un peu inutile…

[6] Autrefois, la distribution des œuvres était difficile à assurer. De nos jours, grâce à YouTube et au Clouds, les œuvres sont partout. Alors qu’il était bien difficile autrefois de se procurer une copie d’une œuvre, il semble que ce soit difficile aujourd’hui, non pas parce que les œuvres ne sont pas disponibles, mais parce qu’il y en a 1 200 autres (semblables) qui leur font en quelque sorte concurrence. Avez-vous des commentaires sur la place de vos œuvres dans ce contexte, maintenant et à l’avenir?

Je n’ai aucun problème avec cela. Beaucoup de mes œuvres seraient encore complètement inconnue s’il n’étaient pas disponible sur le « cloud ». Seulement sur Vimeo, en regardant mes statistique, je sais que mes œuvres on été vues par des milliers de personnes, je sais même que 150 personnes en Allemagne ont vu mes œuvres, pays où je ne suis jamais allé et où mes œuvres n’ont jamais été présentées publiquement! Je me suis fait approché par des festivals prestigieux à l’international, en Écosse, en Suisse et aux US, grâce à ce moyen de diffusion. Je le dis sans prétention, mais les bonnes œuvres sortent toujours du lot parce qu’elles sont bonnes, simplement. Oui, il y en a 1200 autres semblables peut-être, mais avant YouTube je regardais ou écoutais peut-être juste une ou deux œuvres une fois de temps en temps, aujourd’hui par le feed de mes amis sur Facebook, ou pour le simple plaisir de me divertir sur YouTube ou Vimeo, je regarde facilement une 10aine d’œuvres par semaine (je parle d’œuvre d’art, film, musique, etc., et j’exclue du compte la quantité de vidéos de chats que nous écoutons tous mais n’admettrons jamais). Les choses évoluent en parallèle finalement!

[Samedi, le 4 avril 2013]

Social bottom